La sémantique de Carnap, pour quoi faire ?

Mais que peut-on bien faire de la sémantique pour la logique des modalités aléthiques définie par Carnap dans Meaning and Necessity ? S'agit-il d'une sémantique naïve, irrévocablement supplantée par la sémantique de Kripke ? Est-ce à dire qu'il faut reléguer le travail technique de “Modalities and Quantification” aux oubliettes pour ne plus daigner lire que la partie “ philosophique ” de Meaning and Necessity ? A cette derni>ère question nous répondrons résolument non. Nous montrerons pourquoi il est important de se pencher sur les particularités qui distinguent la sémantique de Carnap de la sémantique de Kripke. Cette démonstration aura deux temps. D'abord, nous nous pencherons sur la version propositionnelle de la logique des modalités aléthiques interprétée à la Carnap (C). Nous expliquerons en quoi cette logique, non close par substitution uniforme, peut être conçue comme un “ pont ” vers des logiques modales non monotones. Enfin, nous nous pencherons sur la version quantifiée de C, ainsi que sur certaines de ses extensions, notamment sur une extension hybride dont nous montrerons qu'elle permet de simuler l'intégralité de la logique du second ordre avec sémantique standard modulo une extension du vocabulaire non logique. En bref, nous défendrons l'idée qu'il est légitime de s'intéresser au surprenant lien formel qui unit la logique de Carnap (une logique intensionnelle à l'origine définie dans le but de rendre compte de la notion d'analyticité) et la logique non monotone (qui vise à rendre compte des inférences de sens commun et de leur “ supraclassicalité ” i.e. du fait qu'elles permettent à partir d'un même ensemble de prémisses d'inférer plus de conséquences que la logique classique).